27 juin 2016
Traitement des datas : un défi technique pour les enquêtes journalistiques
Les récentes révélations de Swiss Leaks et des Panama papers montrent que le journalisme d’investigation recquiert une capacité d’analyse des datas. Alexandre Léchenet, journaliste à Libération associé à l’enquête Swiss Leaks et Sébastien Heymann, directeur de Linkurious, la startup française qui a proposé son logiciel de visualisation de graphes dans le cadre de l’enquête des Panama papers, ont tenté de décrire en quoi le big data pouvait changer la pratique journalistique.
L’affaire Swiss Leaks, c’est 150 000 lignes dans une base de données, une centaine de journalistes, une soixantaine de médias et une quarantaine de pays concernés.
Pour dénoncer le système d’évasion fiscale orchestré par la filiale suisse d’HSBC, Le Monde a collaboré avec le Consortium des journalistes d’investigation afin de donner une ampleur internationale à l’enquête et ainsi la rendre incontournable.
Chaque journaliste impliqué sur l’enquête avait accès à la base de données. Leur travail de recherche était coordonné sur « une sorte de Facebook privé ».
Un outil comme Linkurious permet de sécuriser la communication des données. À l’origine, l’outil n’était pourtant pas pensé pour les journalistes même si « montrer des systèmes complexes comme l’interdépendance des banques » a toujours été une motivation dès le départ. Linkurious accélère le travail d’enquête journalistique donc, mais pas que : l’entreprise travaille sur la détection de fraude avec le Ministère de la finance ou dans le domaine médical pour améliorer l’analyse des données de santé.
« Comme l’enquête peut durer, le journalisme d’investigation est très peu financé. » reconnaît Alexandre Léchenet. Ce genre d’outils permet donc d’accélérer le fact checking et peut fournir des intermédiaires pour communiquer.
Linkurious propose un reformatage des données avec une interface web de recherche et d’exploration dédiée pour n’afficher que ce que souhaite voir l’enquêteur et ainsi cibler son parcours au sein des données.
Et avec tout ce travail d’enquête préalable sur la donnée, quand commence la narration ? « Recueillir, analyser les données, se rendre compte qu’on n’est pas assez compétent et qu’il vaut mieux partager le travail, attendre que les partenaires répondent… On a commencé à écrire dans le dernier mois de l’enquête » confie le journaliste impliqué à l’époque sur l’affaire Swiss Leaks.
L’une des leçons à retenir de ce type d’enquête (et facile à mettre en place) est que la collaboration reste un des défis majeurs du journalisme.
« Les journalistes sont habitués à garder leur scoop pour eux, à travailler seuls dans leur coin. Collaborer à plusieurs sur de telles enquêtes permet d’avoir plus de retentissement, de travailler avec d’autres types de profils. »
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