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10 mars 2016

Assises du Journalisme 2016 : jour 2 [Compte-rendu]

Lors de la 2ème journée des Assises du Journalisme 2016 qui se déroulent à Tours, la presse avait rendez-vous avec l’entreprenariat. Choc de culture assuré au cours d’ateliers où il a été beaucoup question du modèle économique des médias. Ouest Médialab y était. Retour sur deux conférences sélectionnées pour les adhérents du cluster.

Les conférences :

Sponsoring, native advertising : valoriser son média à tout prix ?

Table ronde animée par Emmanuel Parody (secrétaire général du Groupement des Éditeurs de contenus et de Service en Ligne, ex-directeur des rédactions de ZDnet, CNETFrance et Gamekult), avec Vincent Coquaz (journaliste, @rrêt sur images), Eric Mettout (directeur adjoint de la rédaction L'Express), Viviane Rouvier (responsable des opérations spéciales, Le Point Communication). Vous avez dit native advertising ? « Il s’agit d’un concept qui se fond dans l’environnement d’un site », rappelle Emmanuel Parody.
« À la base, c’est un format technique qui ne préjuge pas de ce qu’il va y avoir à l’intérieur. Il s’oppose en cela à l’affichage d’un bandeau par exemple. »
La précision a son importance car la définition est loin d’être claire pour tout le monde. Viviane Rouvier met en avant l’importance de l’auteur du contenu qui reste le journaliste. Un constat qui pose justement problème à Vincent Coquaz. Au-delà des questions relatives à l’éthique, il met aussi en avant les problèmes d’identification du contenu. « Cela reste de la publicité. Et le site doit en informer son lecteur... » Ce débat illustre parfaitement le travail d’équilibriste du journaliste dans de nombreuses rédactions, confrontées à l’effondrement du marché publicitaire. Et qui doivent trouver de nouveaux schémas. Pour Eric Mettout, « Il faut réinventer le schéma publicitaire. Nous sommes sur des modèles complexes avec du native donc mais aussi de la pub traditionnelle, des paywalls, du sponsoring etc. ». À ses yeux, « le challenge est de récupérer de l’argent et du contenu intéressant. De faire du « native intelligent ». Il donne l’exemple d’une série d’articles sur l’univers carcéral au féminin publiés dans un journal américain en marge de la sortie de la série Orange is the new black, également sur ce sujet. Les propos d’Eric Mettout (L’Express) ont fait réagir l’assemblée de cet atelier. Il est question d’ « éthique », de « déontologie du journaliste », de « hiérarchie de l’information ».  À l’Express, « ce contenu n’est jamais fait au détriment d’un autre sujet. Il vient en plus », poursuit le directeur adjoint de la rédaction. Il affirme que ce contenu « n'est jamais produit par un journaliste de la rédaction mais par des pigistes ». Comme si au fond, il y avait une différence…
« De toutes façons, nous n’avons pas le choix. Nous nous adaptons à un univers qui évolue vite. Sinon, nous fermons ».

Des incubateurs pour les médias ?

Table ronde animée par Ziad Maalouf (journaliste, présentateur et producteur de l'émission l'Atelier des médias, RFI) avec Jean-Christophe Boulanger (président du Syndicat de la Presse Indépendante d'Information en Ligne, PDG de Contexte), Émilie Friedli (directrice adjointe de Créatis, résidence d'entrepreneurs culturels), Nathalie Guicherd (responsable incubateur des start-ups, Groupe Amaury), Mael Inizan (innovation programs manager, NUMA), Johan Weisz-Myara (fondateur de StreetPress et co-fondateur de Media Maker).
«C’est bien de parler d’entrepreneuriat dans la presse, secteur qui n’est pas traditionnellement innovant. Depuis quelques années, nous observons un vrai mouvement en ce sens ».
À la tête du pure player Contexte, Jean-Christophe Boulanger est aussi président du Syndicat de la Presse Indépendante d'Information en Ligne (SPIIL). Un syndicat qui compte 200 adhérents et qui vient d’en gagner 50 sur une année. Des start-up en majorité, portées par des journalistes à la fibre entrepreneuriale. De plus en plus de ces jeunes pousses naissent et grandissent  dans des incubateurs qui apportent, « au choix, un espace et/ou un accompagnement », comme l’explique Emilie Friedli. Autrement dit, un environnement propice aux rencontres et aux échanges. C’est pourquoi pour de nombreux acteurs, l’accompagnement dédié (dans des incubateurs dédiés à la presse par exemple) n’est pas forcément la panacée. « Oui, il faut des conseils spécifiques », précise Johan Weisz-Myara. Mais il plaide surtout en faveur de la transversalité des pratiques.
« Le but n’est pas de rester entre projets médias. Le contact avec d’autres entreprises (graphisme, développement informatique…) est super important. »
À Paris comme en province, la demande ne manque pas au sein de structures où les échanges d’expériences sont facilités. « Cette année, nous avions entre 600 et 700 dossiers pour 20 places », glisse Maël Inizan.
« La clé pour choisir, c’est l’équipe, l’expertise dans le domaine et idéalement la preuve du concept ».
Et en guide d’ultime conseil, Maël Inizan, recommande aux entrepreneurs-journalistes « de ne pas hésiter à aller voir ses lecteurs potentiels avant de se lancer. Afin de mieux cerner leurs demandes voir leurs besoins ». De réaliser en quelque sorte une étude de marché, une expression qui n’est plus forcément un « gros mot » dans le secteur de la presse. Même si l’information n’est pas un produit comme un autre.